Cinq clés pour comprendre le business au Japon, d’après mon expérience d’ancienne commerciale d’une grande firme japonaise
Mon premier emploi à l’issue de mes études en littérature française à l’université japonaise fut celui de représentante commerciale pour une grande marque de cosmétiques au Japon.
Peut-être serez-vous surpris par un tel parcours… Commerciale après des études littéraires !?!
Oui, au Japon, il est possible d’exercer un métier qui n’a rien à avoir avec sa formation initiale. La formation professionnelle est plutôt assurée par l’entreprise sous forme de cours ou de stage sur site. Une fois, le directeur technique adjoint d’une société japonaise m’a raconté que son premier métier était… coiffeur ! Il connaissait les détails mécaniques des installations mieux que n’importe qui dans la société ! Ne soyez donc pas étonné de ce genre de décalage entre la formation et le métier.
1. La polyvalence prime sur la spécialisation
Si, comme dans le cas de ce directeur technique, une évolution ou une reconversion professionnelle peut se faire facilement dans le pays du Soleil-Levant, c’est qu’une expérience diverse et variée est considérée comme un atout pour appréhender les problèmes. De même, la polyvalence est une qualité importante aux yeux des Japonais. Elle garantit que vous serez capable de vous adapter à de multiples situations. Par conséquent, vous ne pouvez pas dire à votre potentiel client japonais : « je ne sais pas, ce n’est pas mon travail », quand vous ne savez pas répondre à une question sur un produit du service d’à côté que vous ne développez pas vous-même. J’ai entendu des Français tenir ce discours plus d’une fois ! La polyvalence est parfois plus appréciée que la spécialisation dans le business au Japon, car elle permet de trouver des solutions dans toutes les situations.
2. Vous êtes votre société
Si vous êtes chargé d’un projet de collaboration avec une entreprise ou un organisme japonais, vous représentez pleinement votre société. Si vous êtes commercial et qu’une livraison prend du retard, par exemple, vous ne pouvez pas dire à votre client japonais : « ce n’est pas moi qui suis fautif, c’est notre service transport ». Espérer vous dédouaner en rejetant la responsabilité sur un autre service ou un autre collègue sera très mal perçu. Vous risquez de perdre votre business au Japon ! Il faut assumer l’entière responsabilité de votre société avec les Japonais, car pour eux, vous êtes LA société. Par contre, vous pouvez vous excuser auprès des Japonais. Vous resterez responsable du dommage causé, mais cela fera utilement baisser la tension.
De même, ayez un collègue remplaçant quand vous partez en vacances. Il est insupportable pour les Japonais de n’avoir aucune nouvelle parce que le commercial est absent.
3. La confiance en VOUS d’abord, avant la confiance en votre société
Comme je l’ai dit, vous êtes LA société pour les Japonais. Cela veut dire que si vous arrivez à établir une relation de confiance personnelle avec vos clients japonais, ceux-ci feront en retour confiance à la société que vous représentez.
Dans ma carrière, j’ai souvent observé qu’au moment du changement de commercial, les ventes diminuaient. Par contre, elles reprenaient petit à petit, au fur et à mesure que la confiance se réinstallait entre la société et son nouveau commercial.
La confiance est la condition sine qua non pour développer votre business au Japon. Les Japonais ne travailleront jamais avec vous ni avec votre société avant d’avoir noué une relation de confiance avec vous, en tant que personne physique.
Alors, comment faire pour gagner la confiance ? Comme me le disait mon patron quand j’ai commencé à travailler : « il faut tenir ses promesses. » !
Il peut arriver parfois qu’un incident serve à gagner la confiance des Japonais : une fois, un technicien français a trouvé une solution très rapidement à un défaut dans une machine et sa réactivité a été très appréciée. Sa société a ainsi enregistré une autre commande l’année suivante malgré une concurrence rude grâce à cette relation de confiance désormais solide entre ce technicien et les Japonais.
Trouver une solution rapide en cas de problème est un élément important pour gagner la confiance auprès des Japonais. Et ces relations de confiance entre deux sociétés se basent très souvent sur une relation interpersonnelle.
4. La décision est toujours prise de manière collégiale
Dans ma carrière d’interprète, j’ai vu beaucoup de Français se plaindre de la lenteur de la décision d’une société japonaise. Les décisions à la française me semblent verticales, immédiates et basées sur la responsabilité individuelle, contrairement aux décisions à la japonaise qui suivent un processus progressif lent, collégial, basé sur la responsabilité collective. Toutefois, une fois la décision prise, les Japonais avancent très vite dans leurs projets. Ils reviennent rarement sur la décision, car elle a déjà obtenu l’accord de tout le monde. Par contre, j’ai vu beaucoup d’entreprises françaises revenir sur leur décision par manque de concertation interne. Pour les Japonais, vous n’avez alors pas tenu votre promesse et vous pourrez perdre votre business au Japon !
Avec les Japonais, vous pouvez, prendre le temps de consulter vos collègues quant à la faisabilité d’un projet ou du développement d’un produit avant de prendre une décision finale. Ils préfèrent nettement attendre plutôt que de voir évoluer les décisions au gré de vos supérieurs.
5. Les Japonais ne disent pas non ?
On dit souvent que les Japonais ne disent jamais non. Mais c’est faux. Ils l’expriment pleinement par les gestes, les expressions faciales ou le ton qu’ils emploient. Vous ne capterez pas ce langage non verbal si vous n’êtes pas initié à la culture japonaise. La discussion pourrait continuer éternellement sans que vous réalisiez que les Japonais ne sont pas intéressés par vos produits. Vous perdez alors votre temps et ce business au Japon aussi… Si vous avez des doutes, demandez à votre interprète japonais si vos clients sont vraiment intéressés. Il vous aidera à décoder tous ces signaux.
Voici donc cinq éléments clés qui vous aideront à mieux comprendre le business au Japon.
Je vous souhaite un bon développement de votre business dans le pays du Soleil-Levant !